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Photographie documentaire

Les morgues mexicaines de Sébastien Van Malleghem (3/4)

Comment Sébastien Van Malleghem, un jeune photographe belge fasciné par la violence, a transformé sa noirceur en poésie ? Dans ce troisième article, il se rend à Mexico pour comprendre comment la capitale mexicaine évacue ses morts. Appliquez un peu de baume à la menthe sous votre nez et entrez sereinement.

Temps de lecture : 14 min

Si vous avez manqué les deux premières parties, vous pouvez les rattraper ici :

Résumé : Sébastien Van Malleghem est un photographe belge né en 1986. Ses premiers projets Police et Prisons montrent un intérêt pour les sujets violents qu’il aborde avec empathie. On retrouve cette même sensibilité dans The Last Shelter sur les dernières racines de l’underground berlinois.

Introduction : Le dernier tabou

La mort. Aborder le sujet avec un individu, même proche, est fortement à déconseiller. Le fou qui s’y aventure voit instantanément le regard de la personne se dérober à peine le mot prononcé.

Face au malaise ainsi créé, le plus simple est de faire comme si ce moment d’égarement n’avait jamais existé. La situation se calme d’elle-même et revient presque à la normale. Seule demeure dans la tête de l’interlocuteur une légère incrédulité à l’égard de celui qui a initié cette discussion franchement insoutenable.

La vie continue, la mort on n’y pense plus. On s’en éloigne même, le plus possible, tant la sienne est insupportable et celle de l’autre intolérable. Tout semble aller bien jusqu’au jour où l’on est confronté au décès d’un proche. Devant cet événement inattendu qui interrompt momentanément la vie quotidienne, on est sidéré.

On plonge dans un monde violent et inconnu. On ne sait pas comment réagir face à cette chose dont on ne sait pas grand chose au final, tant elle est cachée.

Depuis longtemps, on ne meurt plus chez soi entouré de ses proches mais à l’hôpital, seul. Dans le flou jusqu’au bout, on ne sait pas réellement que l’on est en passe de mourir avant d’être mort. On veut nous préserver. On épargne l’entourage. Jusqu’à la fin, la mort semble pouvoir être contrôlée voire éliminée. 

Une fois l’individu mort, on assiste à des funérailles réglées comme une formalité à mille lieues de la réalité des sentiments éprouvés. Toute manifestation excessive est vue comme une anomalie. On cherche à protéger les enfants en ne pleurant pas devant eux. Chacun vit son deuil de manière individuelle puis retourne à son quotidien, à sa société raisonnable.

Pourtant, la mort n’est pas vécue de la même façon dans toutes les régions du monde. Comme le dit l’écrivain mexicain Octavio Paz :

« Pour l’habitant de Paris, New York ou Londres, la mort est ce mot qu’on ne prononce jamais parce qu’il brûle les lèvres. Le Mexicain, en revanche, la fréquente, la raille, la brave, dort avec, la fête, c’est l’un de ses amusements favoris, et son amour le plus fidèle. »

Octavio Paz, Le labyrinthe de la solitude, 1972

⚠️ L’article contient des images explicites. La lecture est déconseillée aux âmes sensibles et aux ventres pleins.

Mexico Snuff

Mars 2016, Mexico.

Je connaissais l’odeur de la mort. Elle te prend au nez, c’est terrible. Dans une pièce close avec trois ou quatre macchabées, c’est pire. Elle t’enveloppe, s’introduit en toi, et ne te quitte plus vraiment.

© Luis Antonio Rojas – Sébastien Van Malleghem en action

À mon arrivée, les gars de la morgue m’ont dit, tu vas voir, un corps humain qui brûle, ça sent le poulet grillé. Et ils avaient raison.

Le soir, je suis allé bouffer du poulet frit dans un restaurant à côté. Sinon, toute ta vie, ton esprit associe cette odeur à celle d’un humain qui crame. Et c’est foutu, tu n’en manges plus jamais. Alors je me suis forcé.

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Et dire qu’à l’origine le projet au Mexique était censé traiter de l’architecture de la ville.

Le jeune homme et la mort

Quelques mois plus tôt, je recevais un coup de fil du Musée des Beaux-Arts de Bruxelles :

Nous te proposons de travailler sur l’architecture de la ville, dans le cadre d’un échange avec le musée de la photographie du Mexique.

Écoutez, merci pour la proposition, mais vous connaissez mon travail, ce n’est pas trop mon truc.

Va falloir proposer autre chose si tu veux l’invitation.

Les jours qui suivent, j’y réfléchis.

Je visualise Mexico. Une ville perchée à plus de 2000 mètres, construite dans une cuvette entourée de montagnes. Je visualise les 9 millions de personnes qui vivent là. Ça doit grouiller de vie, je me dis. Combien de morts par jour ? Ça doit être dégueulasse. Ça doit puer.

Assis en face de deux types du musée, je leur raconte mon délire sur la mort :

Je veux comprendre comment Mexico évacue ses morts.

Et là leur tête ! Ils deviennent tout pâles et me lancent mollement :

Si c’est ce que tu veux faire, bon, okay…

Pleins d’allant, ils me trouvent un guide local pour jouer le rôle de fixeur. Un flamand qui vit au Mexique. Mais le type n’arrive pas à ficeler son truc. Il a les boules, il n’ose pas quoi.

Deux semaines avant mon départ pour Mexico, je me retrouve sans personne. Et ce n’est pas possible. Tu ne bosses pas au Mexique comme en Belgique. Là-bas, les journalistes, on les enlève, on les bute.

Hors de question que j’aille foutre un pied là-bas sans avoir un gars sûr. Je fais appel à mon réseau et je tombe sur un jeune photographe, Luis Antonio Rojas, un brillant étudiant qui bossera plus tard pour le Washington Post et le New York Times.

© Luis Antonio Rojas a 23 ans lorsque Sébastien Van Malleghem documente les morgues mexicaines. Quelques années de plus sur cette photo.

On s’appelle. Je lui raconte mon projet de documenter les morgues. De manière désinvolte, il me fait, t’es jamais venu au Mexique, toi ? Euh, nan. Tu vas voir. Et il rigole. Le type est tout jeune, et pourtant, il a le culot de me rire au nez en plein entretien.

Alors je l’ai pris. Je me suis dit qu’il avait du cran.

Les Mexicains et la mort

Dès la sortie de l’avion, je peine à respirer tant l’air de Mexico est chaud, moite et pollué. L’impression de sniffer l’intérieur d’un cendrier. Luis est venu me chercher à l’aéroport. Il propose d’aller voir un match de lucha libre, le traditionnel catch mexicain.

Allons-y, dis-je, pas vraiment emballé. Sur la route, à intervalles réguliers, d’innombrables objets du quotidien rappellent qu’ici la mort est partout présente.

© Sébastien Van Malleghem – Quartier de Colonia Alamos

Tu vois, dit Luis, tous ces crânes et ces squelettes montrent la fascination qu’éprouvent les Mexicains pour la mort. À force de la croiser tous les jours, elle est comme une présence familière. On en a moins peur.

De toute façon, le combat est perdu d’avance, c’est toujours elle qui gagne à la fin. Au Mexique, on accepte plus facilement la fatalité des choses. Et puis, on n’a pas ce délire que la vie serait le bien et la mort, le mal.

Contrairement à l’Europe occidentale et son héritage judéo-chrétien, je dis.

Oui voilà. Chez nous, la mort fait partie de la vie. Les deux cohabitent. Voir les choses de cette façon permet de mieux supporter la douleur quand on perd un proche.

Et ça va plus loin que ça. Les morts ont autant de présence que les vivants et les vivants aussi peu de personnalité que les morts. Cette façon presque mystique de vivre la mort se ressent pendant la Fête des Morts.

Ce truc un peu guignolesque à la sauce américaine, je dis.

Ouais. Mais tu vois cette fête, ce n’est pas que l’excès. C’est aussi une façon de vivre la mort ensemble. Elle crée un sentiment d’appartenance qui lie les Mexicains entre eux.

La mort, on s’en amuse. On ne la prend surtout pas au sérieux. Bien qu’elle soit pleine de mystère, on l’aborde avec sérénité. Au final, elle est acceptable et plus soutenable.

On est arrivés, dit Luis.

Mauvaise surprise, il est interdit de photographier à l’intérieur de la salle de spectacle. Je dois déposer mes boîtiers dans un casier à peine sécurisé.

C’est mort, je dis. Je vais bosser direct.

Première morgue

Un verre de pulque, le cidre local, histoire de dire bienvenue au pays, et nous voilà en direction de la première morgue.

Luis prend soin de changer de voiture et d’en sélectionner une toute nase pour éviter d’attirer les regards du quartier malfamé de Colonia Doctores.

C’est ici que se concentre le business de la mort. Au Nord de la ville, autour de l’hôpital central, se côtoient les dealers de came, les vendeurs de cercueils et les fleuristes funéraires.

© Sébastien Van Malleghem

Luis a calé les rendez-vous et m’a obtenu un accord de principe pour que je puisse travailler librement à l’intérieur de plusieurs morgues, à la seule condition que les images ne soient jamais publiées dans la presse locale.

Au 262 de la rue qui longe l’énorme complexe hospitalier se trouve l’entrée de la première. Embalsamadora Doctores sur la façade, on est arrivés.

© Sébastien Van Malleghem – Morgue Embalsamadoras

L’entrée ressemble à un garage. Ce n’est pas étonnant, à l’origine, c’en était un. Et la vieille voiture aux airs de break familial garée dans l’entrée, c’est un corbillard. Les sièges arrière ont été virés pour que les corps fourrés dans de simples sacs puissent être déposés dans le coffre.

C’est ici qu’arrivent quotidiennement entre 15 et 25 morts. Parfois plus de 40. La morgue est tout le temps ouverte car il semble que les gens aient la fâcheuse tendance à mourir à n’importe quelle heure.

Dans la capitale mexicaine, les décès sont essentiellement causés par la pollution, les accidents de la route et le crime.

J’entre.

© Sébastien Van Malleghem

Je longe un long couloir défoncé et rebétonné à coups de truelle après les nombreux passages de caddies mortuaires, et je découvre une pièce sans porte : un lit, un ventilateur en plastique, un bureau basique.

Luis me sert aussi de traducteur. Un des employés m’explique le fonctionnement du lieu. Fatalement, il en vient à parler du processus de l’embaumement.

Faire un beau cadavre

Avant toutes choses, il faut s’assurer que le corps soit bien positionné sur le dos. La gravité pousse le sang vers les parties basses, et s’il était placé sur le ventre, le visage commencerait à se décolorer et les traits à enfler.

Et là, pour créer une apparence plus vivante, c’est une autre paire de manches.

Préparer le corps

Une fois cette vérification faite, on commence par désinfecter la bouche, les yeux, le nez et les autres orifices.

On rase le corps et on l’hydrate. Tout à fait, on l’hydrate, à cause du feu du rasoir. Même la mort ne peut vous en sauver.

© Sébastien Van Malleghem – Adan travaille sur un corps

On masse le corps afin de briser la rigidité cadavérique.

Très important ! Si les muscles sont tendus, ils augmenteront la pression vasculaire, déviant les liquides d’embaumement de là où ils doivent aller.

© Sébastien Van Malleghem

Il convient d’être le plus respectueux possible. Il ne faut pas oublier qu’il y a encore quelques heures, le corps appartenait à une personne vivante.

Fixer les traits

Ensuite, on le place dans une position digne. Après il sera trop tard. Une fois le processus d’embaumement effectué, le corps sera pour ainsi dire figé pour l’éternité.

On met les membres dans la position voulue en évitant toute fantaisie. Les jambes droites et les bras le long du corps. Étape plutôt simple qui se complexifie si le mort a eu la mauvaise idée de mourir une jambe derrière l’oreille ou un tibia en accent circonflexe.

© Sébastien Van Malleghem

Puis, on ferme les yeux. Regardez comment les paupières ont tendance à s’affaisser.

C’est tout à fait normal. Un petit morceau de coton placé entre la paupière et l’oeil pour l’arrondir, et le tour est joué. Si la paupière ressemble toujours à un vieux chewing-gum, on peut remplacer le coton par une capsule en plastique.

Ensuite, on ferme la bouche. Pour la fixer de manière naturelle, on attache aux lèvres un petit fil invisible qu’on relie à la mâchoire inférieure. On bloque l’ensemble en utilisant un moule buccal, une sorte de protège-dents. Pour donner une forme plus agréable, on peut aussi injecter à l’intérieur de la bouche un peu de mastic.

Enfin, on hydrate les paupières et les lèvres pour leur éviter de sécher et leur donner une apparence plus vivante.

Embaumer les artères puis les organes

On commence par embaumer les artères.

Pour cela, on incise au niveau du cou. On insère un premier tube relié à une sorte de pompe qui va permettre d’injecter un mélange de produits chimiques à base de formol. À peu près 8 litres. Évidemment, on ajuste s’il s’agit d’un obèse ou d’un enfant.

Simultanément, un second tube planté directement dans le coeur permet de vider le sang et de l’évacuer dans un évier.

Lorsqu’il reste environ 20% de la solution, on diminue l’intensité du pompage pour éviter de faire éclater les yeux.

© Sébastien Van Malleghem

On vide ensuite les organes. Pour cela, on incise à 5 cm à droite et 5 cm au-dessus du nombril et on perfore chacun d’entre eux : l’estomac, le pancréas et le petit intestin, puis le gros intestin et la vessie. Et on aspire.

On purge l’intérieur des organes pour éviter qu’un liquide brunâtre ne sorte de la bouche du mort devant toute la famille.

Une fois le gros oeuvre effectué, on termine par les finitions et la décoration.

Mettre le corps en bière

Après avoir lavé le corps avec un bon savon antibactérien, on coupe les ongles, on coiffe les cheveux et on maquille le visage. Bien sûr, l’effet doit être aussi subtil que possible.

© Sébastien Van Malleghem

Une fois le mort présentable, on habille le corps des vêtements que la famille aura choisis.

© Sébastien Van Malleghem

Enfin, on place le corps dans le cercueil.

© Sébastien Van Malleghem

Et le voilà paisible pour quelques jours, avant que la décomposition ne reprenne.

Il peut partir vers le lieu de recueillement, avec le même livreur qui l’a amené à la morgue. Sans la moindre forme d’irrespect. Ici, la mort est un corps mort, transporté comme une brique de lait.

Face au gouffre

La seconde morgue s’appelle Grossman. Je découvre deux fours crématoires à côté desquels des tableaux indiquent le planning précis des crémations. Certains jours, je me croirai dans une usine de la mort tellement les corps défileront.

Seconde morgue

C’est là que je rencontre Guerra, une jeune embaumeuse.

© Sébastien Van Malleghem – Guerra (photo non retenue dans la sélection finale)

Elle me raconte son histoire. Son mari a été tué pendant un carjacking qui a mal tourné. Elle était là à ses côtés. Une aide psychologique lui a permis de relever la tête et de trouver un sens à son existence.

Aujourd’hui, elle apporte les derniers soins funéraires avec une grande bienveillance. J’aurais aimé que l’on se comporte ainsi avec mon mari, me confie-t-elle. Guerra travaille dans une grande précarité. Payée à peu près 4 euros par corps préparé. Pas de contrat, pas d’assurance, pas de congés.

À côté de la salle de préparation se trouve le crématorium dans lequel bosse un de ses collègues. Il ne supportait plus de voir les cadavres frais et de sentir les produits chimiques à longueur de journées. Alors aujourd’hui il n’embaume plus les corps, il les incinère.

Entre deux crémations, il attend à côté, dans une petite cour où sont déposés les corps.

© Sébastien Van Malleghem – Un ouvrier funéraire se repose en consultant son compte Facebook sur son téléphone

À chaque petite pause, il s’assoit au même endroit derrière lequel sont plaqués au mur ces deux mots :

DEPOSITO TEMPORAL

Voilà ce que nous sommes, me dis-je. Un dépôt. Un dépôt temporaire. Pas grand chose au final.

Pauses clopes

Parfois c’est dur, vraiment dur. Quand un des gars découpe un corps en deux pour une autopsie, je me retrouve incapable de regarder la scène. Je me cache derrière mon appareil. Quand je n’en peux vraiment plus, je sors prendre une pause. Je m’allume une clope.

Jour après jour, le même rituel démarre dès le petit déj. Un coup d’oeil sur les photos de la veille puis commence la journée à photographier les morts. Les jours passent, et je me dis, on terminera tous comme ça, sur une pauvre table en acier, éventuellement, si la mort est suspecte.

Et le soir, je ne décompresse pas. Je suis seul avec moi-même, dans l’appartement que j’ai loué. Un grand immeuble avec vue sur toute la ville.

Et j’enchaîne clope sur clope. Je pense à Arturo, un type de la morgue avec un seul oeil. Je commence à partir sur un délire mythologique. C’est presque un cyclope qui s’occupe des morts. Wouaaah !

© Sébastien Van Malleghem – Arthuro habille un corps avant de le mettre dans un cercueil

Au bout de deux semaines à côtoyer la mort, je commence à partir en sucette. Un soir, alors que j’enchaîne des clopes à ma fenêtre, je regarde les gens d’en-haut, et je me dis, putain, tous ces gens vont crever un jour !

Je suis en train de péter un plomb, je le sens. J’appelle des proches pour savoir si je ne suis pas en train de sombrer. Mon psy d’abord. On peut faire une heure ensemble parce que je vois des morts depuis 15 jours ? Il me rassure et me dit que je suis toujours lucide.

J’appelle un pote aussi. Putain mec, tu vas trop loin, il me dit. Le type qui brûle, tu ne peux pas montrer ça.

© Sébastien Van Malleghem – Un corps est en train d’être incinéré

Un type qui crame dans un four… Dans l’inconscient collectif, ça rappelle les camps.

On brûle nos arbres et nos déchets, je lui dis. Les humains se débarrassent de tout par le feu. On brûle aussi nos corps. Je veux le montrer. C’est aussi ça la mort.

Je crois que ce reportage est en train de m’affecter, j’ai du mal à redescendre. J’ai besoin de prendre l’air.

Nécropole

Les jours suivants, je décide de visiter des cimetières. Au Mexique, ils ressemblent à des villes tellement ils sont gigantesques.

C’est pourquoi, pour se rendre aux funérailles, les familles louent souvent un bus.

© Sébastien Van Malleghem – Un bus funéraire dans le cimetière de San Nicolas Tolentino, Mexico

Le fonctionnement est très différent de l’Europe. Pas d’employés communaux mais des hommes payés au lance-pierre par les familles, qui creusent et réparent les tombes sous un soleil de plomb.

© Sébastien Van Malleghem – Cimetière de San Lorenzo Tezonco, Iztapalapa, Mexico

Au cimetière de San Lorenzo Tezonco, Iztapalapa, j’assiste aux funérailles d’une mère de 42 ans, décédée à la suite de problèmes respiratoires.

© Sébastien Van Malleghem

La tristesse de ses deux jeunes fils m’oblige à me cacher derrière mon appareil photo. Je déclenche sans pouvoir retenir mes larmes.

Au cimetière de San Nicolas Tolentino, une famille se réunit à l’occasion de l’anniversaire de la mort d’une femme.

© Sébastien Van Malleghem – Cimetière de San Nicolas Tolentino

Des pleurs, des chants. C’est intense. Tout est décuplé, à la mexicaine, c’est hyper humain, des gens hyper touchants.

Vous pouvez retrouver toutes les images de Mexican Morgues sur le site de Sébastien Van Malleghem. Je lui ai demandé s’il pouvait faire un petit geste pour les lecteurs du blog. Avec le code MINIMALISTE, vous avez le droit à 10% de réduction sur toute sa boutique en ligne.

Après deux semaines de reportage, je demande à Luis de m’amener au plus bel endroit qu’il connaisse au Mexique. Je veux rien savoir, juste voir autre chose.

Nulle part ailleurs

Une dizaine d’heures de bus nous conduisent à un lieu secret coincé entre une lagune, les mangroves et l’océan Pacifique.

C’est seulement dans le petit canoë au milieu des raies mantas que je réalise.

Assis sur la plage, je me dis que le monde est beau.

« Nous ne sommes que venus dormir, nous ne sommes venus que rêver. Est-il vrai, est-ce possible que nous soyons venus sur terre pour y vivre ?

Ainsi que l’herbe à chaque printemps, nous nous transformons :
Elle reverdit, elle jette ses bourgeons, tout comme notre cœur.

À peine notre corps a-t-il fait quelques fleurs qu’il s’en retrouve flétri… »

« La vie est un songe » – Poème aztèque (anonyme)

Merci de m’avoir lu jusqu’au bout. Si l’article vous a intéressé, laissez-moi un petit mot, cela fait toujours plaisir. En route pour la fin des aventures de Sébastien : Comment Sébastien Van Malleghem a transformé sa noirceur en poésie.

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31 réponses sur « Les morgues mexicaines de Sébastien Van Malleghem (3/4) »

Les commentaires reçus sont très intenses.

Et les images de Sébastien sont à la hauteur de cette intensité.

Superbe.
On y est, les pieds bien au sol, dans la vie des morgues mexicaines… les cadrages, le traitement des photos, les mots, le récit, le montage de l’article : +++

Pour la Toussaint, vous avez fait très fort 😉

Ps: La photo cadrée sur l’ouverture du four, où ce corps brûle paisiblement, m’a réveillé la nuit (1x).

Cette photo m’a aussi beaucoup marqué. J’espère qu’elle ne t’aura réveillée qu’une seule nuit. Merci Joelle.

Vous avez tous les deux mille fois raison d’oser parler de la mort. Elle ne devrait pas être un sujet tabou, comme elle l’est dans de nombreux pays. Elle serait vécue avec moins de peur, d’appréhension, mieux acceptée si on en parlait simplement. Merci à vous deux.

J’approuve à 300% de faire connaître grâce à cet article une vision du monde (et donc de la mort !) autre de celle de la vision occidentale… La Terre n’est pas que l’Occident.

Fascinant comme toujours ! Les explorations de Sébastien Van Malleghem sont passionnantes et fort bien racontées.

Il choisit toujours des sujets difficiles et peu prisés que tu mets bien en valeur.
Et c’est toujours interessant.
Merci encore une fois.

Toujours courageux Sébastien dans le choix de ses reportages.
Merci de nous avoir fait découvrir cet excellent photographe.

Courageux et extrêmement touchant.

Un grand bravo pour ce reportage et ce message de vie et de mort qui vont bien ensemble… On n’en échappe pas.

Au Mexique, comme dans d’autres cultures extra-occidentales, ils sont restés connectés à l’essentiel de notre passage dans cette dimension/monde.

Bonne continuation avec votre beau travail passionné.

Encore un superbe article ! Merci.

(et dur – les conditions de vie de ceux qui « s’occupent » des morts)

Sans doute le plus touchant de tes articles, en tout cas pour moi.

Le rendez-vous du dimanche que j’entretiens avec tes écrits sont précieux, merci.

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